En ce temps de Noël et après avoir vu la représentation de Marie enceinte, il est temps de passer à son accouchement. Se confond-il avec la Nativité ?
La représentation de la Nativité apparaît très tôt puisque dès le IIIe siècle on trouve dans les catacombes de Sainte-Priscille à Rome, une Vierge Marie présentant l'Enfant-Jésus, qui regarde une étoile.
Mais l’iconographie de la Nativité s'articule vite autour de différentes conceptions de l'enfantement du Christ.
L'ensemble des nativités occidentales, jusqu'au XVIe siècle, dérive du modèle syrien. Dans cette version, la Nativité est un véritable accouchement et la Vierge est toujours couchée, l'enfant est étendu sur la crèche entre les deux animaux, une étoile brille au-dessus de lui, ou un ange annonce la naissance à des bergers, saint Joseph, présenté souvent en simple figurant, est assis, la scène se passe dans une grotte ou une étable construite dans une grotte.
Voici une nativité d’un parchemin ottonien de 1025, sur lequel on trouve ces éléments.
D’où vient la tradition du bœuf et de l’âne ? celle de la grotte ? De l’évangile apocryphe (c'est-à-dire non reconnu par les canons de l’Eglise, car trop tardif) du Pseudo-Matthieu, chapitre 14 : “Or, deux jours après la naissance du Seigneur, Marie quitta la grotte, entra dans une étable et déposa l’enfant dans une crèche, et le bœuf et l’âne, fléchissant les genoux, adorèrent celui-ci. Alors furent accomplies les paroles du prophète Isaïe disant : ““Le bœuf a connu son propriétaire, et l’âne, la crèche de son maître””. Ce texte est le premier à harmoniser l’évangile canonique de Luc qui parle de l’étable avec la tradition de la grotte.
Un autre récit fait aussi son apparition dans cette représentation, celui des deux sages-femmes. Leur présence est naturelle dans une scène d’accouchement, elles doivent laver le nouveau né pendant que Marie se repose. Mais selon le Protévangile de Jacques ch. 18 à 20, écrit toujours apocryphe, elles doivent attester de la virginité de Marie, et si la première ne connaît aucune hésitation, la seconde, Salomé, incrédule, demande à constater. Sa main se desséchant, il lui suffit pour guérir de toucher l’enfant, ou simplement ses langes.
Nativité de Duccio di Buoninsegna 1308
On voit par là que cette représentation de la Nativité sous la forme d’un accouchement, cherche le réalisme mais n’exclut pas le merveilleux.
Du milieu du XIIIe à la fin du XIVe, sous l'influence de l'iconographie italienne, pénètrent peu à peu des attitudes de tendresse. Marie s’occupe de son enfant, Joseph ne reste plus passif, les différents personnages deviennent les acteurs d’une même scène alors qu’avant l’Enfant pouvait être représenté plusieurs fois comme dans une BD.
Ainsi cette Nativité du Maître de Salzbourg datée de 1400 est elle très différente de celle du baptistère de Pise, grande œuvre de Nicolas Pisano de 1260.
A la fin du moyen Age, cette Nativité comme accouchement va évoluer vers un autre modèle. En Italie, on voit apparaître au milieu du XIVe, la Vierge à genoux. Puis le thème de l'adoration se substitue au thème de l'accouchement.
La Vierge alors qui visiblement n'a pas souffert, est agenouillée, les mains jointes devant l'Enfant nu et lumineux, couché sur une botte de paille ou sur un pan de manteau. . Quant aux sages femmes elles ont naturellement disparues. Cette idée d'un enfantement sans souffrance existait déjà dans l’antiquité sur quelques sarcophages et ivoires mais il était très rare. L’adoration devient le seul thème à partir de la Renaissance.
Ce n’est que lorsque les normes iconographiques s’estompent au XIXème et surtout au XXème s. que la représentation de la Vierge accouchée réapparaît mais souvent il ne s’agit plus de peinture religieuse.
A gauche Nativité de Hippolyte Flandrin 1856 à droite clle de Paul Gauguin Te Tamari No Atua 1896
JOYEUX NOEL