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  • LE JUGEMENT DERNIER

    La mise en scène du Jugement dernier se fonde sur le Livre de Daniel et sur le ch. 25 de l’évangile selon Matthieu

     

    La seule image qui corresponde à une lecture immédiate est cette mosaïque  du 6e s. à St Apollinaire le Neuf à Ravenne, avec la première représentation du diable qui n'est pas rouge

     

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    LES 7 ŒUVRES  DE MISERICORDE

    Elles sont directement copiées sur le texte de  Matthieu,  ce sont :nourrir les affamés ; donner à boire aux assoiffés ; vêtir les dénudés ; héberger les sans-logis ; libérer les prisonniers ; visiter les malades ; ensevelir les morts (cette œuvre sera rajoutée au XIIIème siècle).

     

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    Le jugement dernier et les sept œuvres de miséricorde,  Bernard van Orley Huile sur panneau , 248 x 406 cm ;
    Bruxelles 1491/ 1492 - Bruxelles 1542
     

    Vers 1518, la Chambre des Pauvres d'Anvers commanda un triptyque à Bernard van Orley.   Pour l'autel de la Chambre dans la cathédrale d'Anvers.

    Au centre   le Christ prononce le Jugement Dernier. Il est assis sur un arc-en-ciel, symbole de l'alliance entre Dieu et les hommes. L'archange Michel assiste le Christ en procédant à la pesée des âmes. Les élus se voient accorder l'accès au paradis, les réprouvés finissent en enfer. Répartis sur l'ensemble du triptyque, on retrouve les sept œuvres de miséricorde.

    Sur le panneau central, Van Orley a représenté la septième et dernière œuvre : quelques hommes ensevelissent un mort.

     

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    Sur le volet de gauche, des aumôniers donnent à boire aux assoiffés, nourrissent les affamés et offrent l'hospitalité à un étranger. 

     

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           Sur le volet de droite, des vêtements sont distribués aux mendiants et un malade reçoit réconfort et secours. À l'arrière-plan, on assiste à la libération de prisonniers incarcérés pour leurs convictions religieuses, or c’est le moment où le peintre est poursuivi pour ses sympathies luthériennes

    Ce triptyque n'illustre pas seulement les activités de la Chambre des Pauvres. Il exhorte également les aumôniers à une vie vertueuse et charitable. 

     

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    Les Sept Œuvres de Miséricorde ;  Le Caravage   (1606 – 1610) un immense tableau d’autel (3,90 x 2,60)  pour l’église de Pio Monte della Misericordia à Naples

    Caravage propose ici une solution géniale à un problème complexe : il est le premier peintre à représenter les sept œuvres non pas séparément mais ensemble. Riches et pauvres, nobles et miséreux sont représentés une soirée quelconque dans un des carrefours espagnols de Naples, ils symbolisent les œuvres de Miséricorde.

    Une femme du peuple allaite un vieillard à la porte d’une prison; c’est une version de la Charité romaine selon laquelle une jeune fille, Péro, allaite secrètement en prison son père, Cimon ou Mycon, condamné à mourir de faim.   Cette histoire est rapportée par plusieurs auteurs dont chez Pline l'Ancien (Hist. nat., VII, 36),  Le thème faisait écho à la légende mythologique de Junon allaitant Hercule (et créant, par un jet de lait, la Voie Lactée).
    Un gentilhomme comme St Martin dégaine son épée afin de couper son manteau et de le partager avec un mendiant nu ; un aubergiste donne à boire à un assoiffé (il se sert d’une mâchoire d’âne comme Samson) et un autre accueille des pèlerins épuisés. Les pieds du cadavre sur lesquels se pose un rayon de soleil nous rappelle l’impératif d’ensevelir les morts.

     

     LES JUGEMENTS DERNIERS

     

    Nous suivrons les analyses de André HERREN dans Le Jugement dernier en procès, 2011 ed. Olivétain

     La représentation prend très vite une forme stéréotypée

    voici ce qui caractérise un jugement dernier. last-judgment-anf-the-wise-and-foolish-virgins.jpg

     

    En haut : Christ à la fois Fils de l’homme glorieux et Jésus crucifié, il préside tribunal et énonce verdict

            Séparation des justiciables : élus à sa droite, et réprouvés à sa gauche

            Deux lieux de destination : paradis (sein d’Abraham, Jérusalem céleste, jardin d’Eden) et enfer (chaudron, gueule)

            En bas résurrection générale, sortie des tombeaux

     

     

    COMPARAISON DE 3 JUGEMENTS DERNIERS MEDIEVAUX

     

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    CONQUES ;  l’abbaye a été construite à partir de 1050 par l'abbé Oldoric

     

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    BOURGES Les travaux commencent en 1195 et se poursuivent tout au long du 13ème

    ST DENIS   Tympan du XIIe siècle, Suger +1151 ;saccagé à la Révolution, restauré au XIXe siècle

     

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    BEAUNE  retable sous la forme d'un polyptyque en quinze panneaux du peintre flamand Rogier van der Weyden, peint entre 1443 et 1452 pour l'Hôtel-Dieu de Beaune sur commande de son fondateur le chancelier Nicolas Rolin

     

    COMPARAISON DES CHRIST JUGES

     

    Christ est il le crucifié prêt à se venger ou celui qui donne sa vie : justice ou miséricorde ?

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    Le Christ pantocrator, au sommet du ciel, mandorle, les anges …  juge suprême avec main qui sauve et main qui condamne,

     représente le Christ comme un empereur, « on utilise l’image du Christ triomphant pour asseoir le pouvoir ecclésiastique et social de l’Eglise et entretenir la peur et l’allégeance des fidèles » André Herren p 251

     

     

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    A Bourges  Christ plus homme, c’est le crucifié qui juge et sépare, il a le torse plus ou moins nu et montre ses plaies dans un geste qui fait penser à un geste d'accueil. Ce n'est plus le Christ glorieux de l'Apocalypse mais le Christ incarné qui a souffert sa passion. Il n'a plus de mandorle, il n'a même plus le nimbe crucifère traditionnel.

     

     BEAUNE 

    Christ domine terre et est sous arc en ciel mais Celui qui est sur le trône est un blessé. Ses cicatrices brillent comme des pierres précieuses. Son manteau semble teint du sang qu’il a répandu

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    Les deux phrases inscrites sous la fleur de la miséricorde et l’épée de la colère viennent du chapitre25 de l’évangile selon Matthieu, celui qui fournit les critères du jugement Une main accueille l’autre laisse aller sans descendre

      Sous les lys  venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le Royaume préparé pour vous depuis la fondation du monde

      Sous l'épée écrit en noir : allez loin de moi, maudits, au feu éternel préparé pour le diable et pour ses anges

     

    COMPARAISON DES SAUVES  

    Conques 2d registre le Christ dans mandorle gloire céleste, 2 mains : « venez et éloignez vous »; à gauche : les saints avec Marie, abbé roi Charlemagne ; espérance charité constance humilité 4 vertus théologales

            3e registre : paradis avec Abraham tenant les âmes dans son sein et Ste Foy à qui l’église est dédiée  

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    Bourges Grande importance de l'archange St Michel (et de son sourire). A sa droite, les élus et la figuration du ciel : les âmes dans le sein d'Abraham. En tête des élus, St Pierre et ses clefs suivi d'un moine cordelier (St François, mort en 1226, canonisé en 1228). Le roi ne peut être St Louis qui était alors bien vivant.  

    Ordre et calme partout

     

    COMPARAISON DES DAMNES

     

    Conques  on peut en reconnaître certains dont  Henri 4 d'Allemagne , Grégoire 8 et un abbé simoniaque  

            3e registre :   Satan , enfer avec orgueil félonie luxure avarice médisance, gloutonnerie, paresse donc ce sont les 7 péchés capitaux qui sont condamnés

     

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    Bourges Les damnés sont nus et anonymes

    St Michel pèse et intervient directement contre diable au dernier moment , intercession miséricorde ? mais rien de la part des élus , aucune œuvre

     

     

    Beaune est très différent

    Aucun tombeau   Les morts ne sortent pas de la pierre froide, mais de la terre nourricière dont ils avaient été tirés au matin du monde.

    Le temps de la re-création est maintenant venu   : un homme complètement sorti, agenouillé, mains jointes dans l'attitude de la prière,  un autre aide sa jeune femme à se relever, dans un joli geste de tendresse, avant de l'entraîner sur le chemin du Paradis ; 
    Seconde originalité du retable : les ressuscites sont simplement eux-mêmes, ils sortent de terre nus, tels que Dieu les a faits et tels qu'il les recrée à l'image de son Fils bien-aimé, tous à 33 ans comme celui du Christ

     

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    beaune029.jpgDe chaque côté de l'archange s'opère un départage. Les ressuscites, en s'éveillant, s'orientent par rapport à la Lumière du Christ. Les uns s'offrent à son rayonnement et, leur mouvement de résurrection s'accentuant, ils se redressent. Les autres s'en détournent, échappent à son attraction et chutent lourdement.

     

     

    L'atmosphère, ici, n'est plus celle du « Beaucoup sont appelés et peu sont élus», mais celle du «Quand je serai élevé de terre, j'attirerai tous les hommes à moi».  Rien, sauf la liberté de l'homme.   


     Du «bon côt
    beaune025.jpgé», celui de la droite du Christ, les élus trouvent leur vrai visage, celui que l'amour modèle à la ressemblance du Fils et qu'exprimé si bien le beau geste de tendresse de l'homme aux mains tendues vers sa jeune épouse


     

     

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    Du « mauvais côté », celui de la gauche du Christ, la création se défait : les visages se dégradent, se bestialisent, la terre, de plus en plus aride et crevassée, ne fournit plus l'eau nécessaire à la vie végétale, le règne minéral reprend le dessus

     

     

     

    En enfer ils sont solitaires, aucune compassion ne les lie; le seul instinct qui leur reste est celui du meurtre. Les forces de vie sont étouffées. Il n'y a plus d'espace libre, ni pour soi-même, ni pour autrui, ni pour Dieu, et c'est peut-être cela aussi que veut signifier cette accumulation de corps entassés, par opposition aux corps moins nombreux qui, du côté des élus, ont autour d'eux l'espace nécessaire pour respirer.

    La situation de chacun ne dépend pas d’un combat entre anges et démons, mais chacun apparaît responsable : dans la balance c’est le même homme qui est pesé selon son mérite ; Christ regarde avec bienveillance il exhorte à renoncer à l’enfer de l’égoïsme, de la violence le pardon est possible

     

     

    LUCAS DE LEYDE 1494 - 1533

     

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    La plus grande réalisation de et son vrai chef-d'œuvre 

    triptyque du Jugement dernier 1526-27, musée de Leyde  271 x 185 cm

    tableau votif peint à la mémoire de Claes Dirck Van Swieten  soigneusement préservé des troubles iconoclastes du xvie s. par les Leydois eux-mêmes,

    Le Paradis (avec au revers Saint Pierre) et l'Enfer (avec au revers Saint Paul ) encadrent la scène du Jugement dernier,

    La scène centrale, qui se poursuit sur les volets, comprend peu de personnages, mais Lucas les étudia très attentivement et soigna plus particulièrement les relations entre les groupes en jouant sur l'opposition des corps clairs et du sol brun sombre. 

     

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    MICHEL ANGE  Le Jugement dernier (1536-1541). Alors que le plafond  de la SIXTINE  est bien antérieur 1508 – 1512    

     

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    Abandon de la mise en scène en bandeaux, et du Christ souffrant qui est remplacé par l’Homme Dieu victorieux de la mort    

    Tout bouge mouvement ascendant et descendant 

     Le Christ, représenté juste avant que ne soit prononcé le Jugement Dernier  Son geste à la fois impérieux et calme semble attirer l'attention tout en apaisant l'agitation ambiante : il crée un mouvement rotatoire, ample et lent, qui entraîne tous les personnages présents. Seuls les groupes d'anges qui volent en portant les symboles de la Passion, dans les lunettes du haut  sont exclus de ce mouvement.
    La Vierge est à côté du Christ, elle penche la tête en signe de résignation. Car, elle ne peut plus intervenir dans la décision mais seulement attendre l'issue du Jugement. Les Saints et les Elus, disposés autour de la Mère et du Fils, attendent eux aussi dans l'anxiété l'annonce du verdict. Certains d'entre eux sont facilement reconnaissables : Saint Pierre avec les deux clés, Saint Laurent avec son gril, Saint Bartholomé avec sa propre peau où l'on distingue l'autoportrait de Michel-Ange, Sainte Catherine d'Alexandrie avec sa roue dentée, Saint Sébastien à genoux les flèches à la main. Au-dessous, au centre, les anges de l'Apocalypse réveillent les morts au son de longues trompettes ; à gauche les ressuscités en ascension vers le ciel récupèrent leurs corps (Résurrection de la Chair), à droite les anges et les démons s'empressent de précipiter les damnés en enfer. Enfin, en bas, Charon fait descendre les damnés de son embarcation à coups de rames, assisté par des démons, pour les conduire devant le juge des enfers Minos, le corps pris dans les anneaux du serpent. Ici, la référence à l'Enfer de la Divine Comédie de Dante Alighieri est évidente.   

     

    MAINTIEN ET EVOLUTION D’UNE TRADITION ICONOGRAPHIQUE

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    Von Peter Cornelius   1839 tempera  église St Louis de Munich

    Commentaire par Théophile Gautier http://www.geographis.ch/~podouphis/Gautier_Cornelius_2.htm

     

    Doré pour sa Bible illustrée en 1897

     

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    Mais le Jugement devient difficile à représenter et sans doute à penser, et les images se centrent sur la résurrection des morts

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    Burne Jones 1896, Cathédrale de Saint Philippe de Birmingham. A noter le livre tenu par l’ange , cela renvoie à l’Apocalypse

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Résurrection de la mort, Victor Mottez 1809 1897 , huile sur toile , musée de Lille   Mottez.jpg

    Développement du sentimentalisme et de la croyance dans les retrouvailles entre membres de la même famille

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    Au jugement dernier Theodor Baierl; German, 1881 - 1932

      1918 – 1920 ; 81x64 cm crayon sur papier Un allemand amoureux du Quattrocento, qui montre des amants et un homme soutenant son père ?

     

     

     

     

     

     

     

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    Grave sky et Gehenna fire Barry EUREN peintre américain né en gill.jpg1948

     

    Le Jugement dernier ; Eric GILL ; 1917, gravure bois, 

     Jugement strictement individuel

     

     

    Fernando Botero Painter Colombian [phistars.com] 5 stars 1932 Figurative Art celestial-portal 1993.jpg

     

     

    Porte du Paradis, Fernando Botero , huile 1993

    Vierge à l’enfant, nouvelle Eve écrasant le serpent, montée d’Adam et Eve, une femme sauvée par la main de Dieu, en bas à gauche Mère Teresa et à droite le soldat espagnol de la conquête (le peintre est colombien)

     

     

     

     

     

     

     

     Cette étude se termine par l’analyse de La peseuse de perles ;Johannes VERMEER, 1662-63 huile sur toile, 42,5 x 38 cm National Gallery of Art, Washington

    Telle que la présente André Herren, op.vermeer.jpg cit. p 304

     

    « La jeune femme tient à la main une balance en équilibre.

    On distingue au mur une représentation tout à fait classique du jugement dernier, exécuteur du jugement, le Christ donne l'impression d'être placé sur la tête de la femme comme s'il la bénissait elle et nous les spectateurs. Nous n'avons pas affaire au juge implacable du jour fatal, mais au Christ qui a promis sa présence attentive, aimante et exigeante tous les jours jusqu'à la fin du monde.

    Cette jeune femme se concentre sur la balance, elle est recueillie et exprime une paix intérieure, or les plateaux équilibrés sont vides. On ne peut donc pas interpréter ce tableau comme une femme vénale fascinée par les bijoux. La balance exprime au contraire sa maîtrise de la situation et sa responsabilité. On ne peut pas non plus en faire une personne vivant dans la crainte de l'avenir et du jugement dernier car le tableau est placé de côté, il ne la domine pas pour lui faire peur, c'est comme un simple rappel que le mal est bien présent, mais jugé, et que tout ce qui se joue dans sa vie est de la plus haute importance. Quant au miroir qui lui fait face il pourrait symboliser la connaissance qu'elle a d'elle-même. Elle se connaît et semble assumer sereinement sa vie devant Dieu, elle est maîtresse de son action et capable de juger elle-même le monde et d'actualiser à sa manière le commandement d'amour. Enceinte elle est porteuse de vie et l'enfant en gestation symbolise les promesses d'un avenir que personne ne peut lui ravir. Elle va recevoir cette vie comme elle a reçu la sienne, elle sait qu'elle n'est pas maîtresse de cette vie même si elle occupe en toute modestie la place de l'archange. Une femme adulte, sereine et responsable de sa vie devant Dieu, tel est donc le modèle que Vermeer nous offre aux termes de ce voyage. »